Depuis 13 ans et plus que jamais,
notre rubrique « 100 mots pour le dire » connait un succès
incontestable. Chaque mois, nous découvrons avec plaisir les textes qui nous sont
adressés. La compétition entre une dizaine d’habitués (certains ayant été
sélectionnés plusieurs fois) et les petits nouveaux qui sont de plus en plus
nombreux devient de plus en plus serrée.
Cette année, notre comité de
lecture a établi le palmarès suivant où se côtoient habitués et
nouveaux :
d’abord « Hialeah » de
Bernard Barbarroux,
puis « Les osmanthes »
de Marie Derley
et « Simples » de
Viviane Campomar.
Le concours permanent de la
meilleure micro-nouvelle du mois est à consulter sur le blog (www.nouvellesdharfang.blogspot.com) sous l'onglet Micro du mois
Les micro-nouvelles sont à poster
sur l’adresse suivante : revueharfang@laposte.net
Hialeah
Elle
ne mettait qu’un « z » à blizzard, et lorsqu'il sortait au petit
jour, elle craignait que ce ne soit pour toujours. Elle pleurait les nuits
d’orages, se souvenait des grands baobabs de l’Okawango et de
Bulawayo, préférait passion à prison et douceur à douleur. Elle
ressemblait à ces navires sans capitaine, cinglants vers la mer des Sargasses.
Alors, il la berçait comme on berce une enfant, gardant dans son cœur la vision
de leurs tendres années, loin là-bas, vers les Bighorn Mountains d’où dévalent
les torrents furieux et s’élancent les aigles criards pour survoler la vallée.
©
Bernard Barbarroux
(Novembre 2024)
Les osmanthes
Quand
le jardinier a buté sur le premier os, j’ai eu le bon réflexe :
–
Laissez, Cédric, mon père avait enterré là son chien.
De
nuit, j’ai creusé et retiré le squelette. Ce matin, pendant que je restaure ma
manucure dévastée, je regarde le jardinier planter là des profusions
d’osmanthes. D’où me vient le pressentiment que le cadavre est une femme ?
Comment diable est-elle arrivée là ? Mon silence entérine sa disparition
mais si je parle, ils feront sauter mon kiosque. Impensable : c’est lui
qui fait tout le charme de mon jardin.
©
Marie Derley (Décembre 2024)
Simples
Veuve,
enfin. Elle peut se consacrer aux simples. Avec prudence, car suspecte depuis
l’enfant mort-né, chaque jour elle affiche sa ferveur à l’église. Dans son
antre en terre battue mijote une infusion de joubarbe pour les diarrhées de
Marie. Une décoction abortive d’hellébore et de concombre sauvage pour la
petite Jehanne souillée par son ordure de père. Les guérisseuses ont la vie
brève, l’odeur de chair brûlée du village voisin la hante encore, trois femmes
un peu trop libres accusées de copuler avec Satan. D’un coup de pied, elle
chasse un chat noir et va prier pour son salut.
©
Viviane CAMPOMAR (Janvier 2024)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire