Harfang souhaite une bonne...
une meilleure....
une excellente année 2023
où chaque jour apporte
une bonne nouvelle !
Harfang souhaite une bonne...
une meilleure....
une excellente année 2023
où chaque jour apporte
une bonne nouvelle !
On découvre aussi des
nouvelles originales et fortes que le comité de lecture a sélectionnées, celles
signées J. J Derôme, Kévin Despond, Victor Dumiot, David Hoon Kim et Jérémie
Sanchez-Groussard...
Enfin, on retrouve les
rubriques habituelles sur l’actualité de la nouvelle : recensions des
recueils, des recueils et des prix.
Harfang
N° 61, 106 pages 12 €
Chèque
à adresser à Harfang 13 bis avenue
Vauban 49000 Angers
Effractions, Pierre Peju Gallimard, 304 p., 21 €
Dans ces trois nouvelles (ou petits romans ?) de cent pages placées
sous le titre générique des « effractions »,
les personnages saisis à trois âges de la vie sont surpris par un événement
qui vient les bousculer et faire irruption dans la vie d’autres personnages et
aussi par la rencontre de hasard avec une femme dont on ne sait si elle sera
providentielle ou non.
Dans la deuxième, un écrivain reconnu s’apprête à prendre l’avion pour se
rendre à un festival littéraire en Tunisie… à ses côtés, un homme qui lui
ressemble fait un malaise. Il se retrouve alors (par hasard ?) à Tunis,
avec les papiers d’un archéologue nommé Neumann dans une sombre histoire de
services secrets français et tunisiens ayant pour objectif d’éliminer une certaine
Yasmine… Jusqu’où le mènera cette « usurpation »
d’identité ?
Enfin dans la troisième intitulée « péremption »,
Victor qui à plus de soixante dix ans s’est inscrit à un club un peu spécial,
arrive à Biarritz où son « contrat »
stipule qu’il doit y exécuter une
personne en sachant qu’un jour lui-aussi sera la cible du même contrat… Mais en retrouvant Élisa, il aimerait revenir sur ce
pacte diabolique : jusqu’à quand pourra-t-il en reculer l’échéance ?
Empruntant aux codes du polar auquel il ajoute une bonne dose d’humour et
de fantastique, ce recueil est aussi une réflexion sur l’art, la littérature,
l’identité, la vieillesse et la mort. P.
Péju signe là un recueil exemplaire où les surprises successives multiplient
le plaisir des lecteurs…
Que vous ayez déjà lu -ou n
on- tous les livres d’E. Ruben et que vous pensez savoir tout -ou tout ignorer- sur l’Ukraine, dans tous les cas, ce recueil est fait pour vous.
D’abord sans se conformer aux diktats de l’actualité et des médias, c’est l’occasion d’en apprendre plus sur l’histoire, la géographie, l’économie de l’Ukraine… et surtout sur les ukrainien(ne)s, jeunes ou vieux. Au fil des pages, on découvre leurs portraits croqués en quelques mots, leurs traditions, leurs légendes, leurs croyances, leur culture, leurs habitudes de vie quotidienne. Que ce soit à travers les pérégrinations de l’auteur à vélo avec Vlad, ou bien que ce soit en train avec Kolia et Katia, jeunes mariés de retour dans leur village natal…
Ensuite parce que dans « Confluence imaginaire » vous retrouverez Vlad, le compagnon de route imaginaire de « Sur la route du Danube » (2019). Et aussi parce que le cimetière abandonné du « dernier des Khazars » vous rappellera « Halte à Yalta » (2010) et annonce « Les méditerranéennes » (2022)…
Le recueil se clôt sur le « retour à Kiev » en février 2014, quelques mois après la révolution citoyenne de Maïdan, où E. Ruben part à la recherche de son ami Yarick et se fait le « témoin de l’après, le témoin du désenchantement ».
Ainsi chaque texte est le reflet de ce qui anime l’écriture d’E. Ruben depuis ses débuts.
Ainsi une œuvre se compose sous nos yeux comme les morceaux d’un puzzle que le lecteur peut reconstituer au fur et à mesure…
Cris, pleurs, requêtes, récriminations, révoltes ne sont pas d’un individu mais d’un groupe, d’un collectif où le « nous » est omniprésent, sorte de chœur antique qui s’adresse tour à tour aux magistrats, aux voisins et voisines, aux maris, aux mamies, aux ministres… et aussi, pour n’oublier personne, au Président et à Dieu lui-même !
Ce sont les discours de ceux qui n’ont plus accès libre aux plages, le « discours d’une troupe en pyjama » composée de vieillards évadés d’un Ehpad, et aussi les discours de jeunes, d’enfants, de petits- enfants, de marginaux, de citadins, de ruraux…
Revendications sociales,
économiques, écologiques qui s’opposent aux discours des responsables politiques
d’abord parce que « les mots se
mettent à dire le contraire de ce qu’ils disent » et ensuite parce que
même si l’on vote « cela ne change
rien ».
Comme le titre l’annonce, ces
discours ne sont pas exempts de contradictions conscientes et assumées car « il
y a d’un côté l’envie de se faire un peu de mal, de l’autre l’envie de se faire
un peu de bien » (p. 11).
Rares sont les recueils qui parlent aussi bien de la réalité contemporaine, rares sont les recueils éminemment politiques sans sombrer dans les écueils partisans. C’est donc tout à l’honneur des académiciens Goncourt de lui avoir attribué le Prix de la Nouvelle 2022…
Les premières lignes du recueil
le disent clairement : « les
limites territoriales, les migrateurs les ignorent »… car les oiseaux
tout comme les personnages ignorent les frontières qu’elles soient sociales,
économiques ou morales… mais d’abord et surtout géographiques, que l’action se
passe en France, en Allemagne, en Espagne, au Portugal ou au Maroc ou que le
lieu donne le titre de chacun des sept passages : « fleuve, périf, mer,
détroit, ciel, horizon, delta ».
Continuité aussi, puisque ces
nouvelles, écrites au fil des années qui passent, sont bien reliées par un fil
rouge que l’on trouvait déjà dans la nouvelle centrale intitulée « Le détroit » publiée dans
Harfang (N° 45) en 2004 !
Sept nouvelles au fil de l’eau, sept balades tragiques où l’on croise des personnages haut en couleurs comme sait si bien les saisir G. Verdet : outre les deux banlieusards retraités, Angela une ex-allemande de l’est, un junky anglais, une ouvrière marocaine, un écrivain américain, un tueur à gages…
Merci à Rhubarbe de faire « passer » ce genre de recueil que chaque lecteur doit faire « passer » à son tour au plus grand nombre…
(Lire nouvelles et entretien de Gilles Verdet dans Harfang N° 45 & 49)
A la Bibliothèque Municipale Toussaint, vendredi 10 juin, nous avons assisté à une belle "soirée nouvelles" qui s'est déroulée en trois temps...
D'abord avec la remise (différée depuis novembre 2020) de la huitième édition du prix de la Nouvelle en présence de la lauréate Viviane CAMPOMAR qui a lu des extraits de la nouvelle qui donne son titre (prémonitoire ?) au recueil "J'irai mourir à Odessa" (publié aux éditions Paul&Mike).
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Viviane CAMPOMAR lisant "J'irai mourir à Odessa" Photo. A. M |
Ensuite avec la table ronde où V. Campomar (Prix 2020), S. Dubin (Prix 2010) et E. Roche (Prix 2016) ont pu parler de leur recueil respectif, de leurs projets de recueil ou de roman, du passage de la nouvelle au roman et des difficultés de passer du court au long...
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Table ronde avec S. Dubin, E. Roche, V. Campomar
Photo A. M |
Enfin, avec la présentation et la lecture des micro-nouvelles (en 100 mots) extraites du Harfang Hors Série N° 13... histoire de terminer en beauté et de fêter les 30 ans d'Harfang ainsi que les 10 ans du blog et de la rubrique mensuelle "100 mots pour le dire".
Enfin, cerise sur le gâteau d’anniversaire, le numéro sera présenté lors d’une « soirée-nouvelles » à la Bibliothèque Municipale Toussaint à Angers le vendredi 10 juin à 19 heures (entrée libre) et sera l’occasion d’une mini table ronde avec Viviane Campomar (Prix 2020), Emmanuel Roche (Prix 2016) et Sylvie Dubin (Prix 2010)
HARFANG Hors Série N°13 100 pages, 10 €
(Chèque à l’ordre d’Harfang à adresser à Harfang 13bis avenue Vauban 49000 Angers)
Avec ce soixantième numéro, Harfang fête ses 30 ans au cours desquels plus de 600 nouvelles signées par plus de 450 nouvellistes ont été éditées. Pourtant, pas de gâteau ni de cerise, pas de bougies non plus… Rien d’autre que des nouvelles, des nouvelles et encore des nouvelles.
D’abord, celles de ce numéro. Choisies par notre comité parmi les centaines qui nous sont parvenues tout au long de l’année 2021, elles ont toutes été écrites pendant ou après ces temps propices à l’écriture pour certains, toutes cependant sont « garanties sans Covid » pour parler d’autre chose que de virus et de confinement. Signalons qu’il s’agit d’une première publication pour la plupart : « La véritable histoire de Martin Eden » de C. Baud, « Le moulin d’Alphonse Daudet » de T. Juncker, « La mer » de F. G. Martin… La découverte de nouveaux auteurs à travers la lecture est toujours un moment même si cela ne remplace la rencontre et l’échange, comme nous le proposons habituellement dans nos pages… Pouvons-nous oublier que depuis deux ans, nous avons été privés de rencontres dans les salons du livre, les festivals, les bibliothèques et les librairies.
Harfang N° 60, 108 pages, 12 €
13 bis avenue Vauban 49000 ANGERS
Microfictions 2022, Régis Jauffret, Gallimard, 1026 pages, 26 €
Après Microfictions 2007, puis Microfictions
2018
(Goncourt de la Nouvelle 2018 ; lire
Harfang N°52), voici
le troisième tome, composé comme les précédents de 500 microfictions de deux feuillets, classées par ordre alphabétique
des titres de « Applaudir la France »
à « Zibeline ».
Belle constance sous la plume
acérée de R. Jauffret qui ne
faiblit pas, sans doute à un rythme de 2
ou 3 textes par semaine. Il est vrai que les sujets sont inépuisables : il
suffit d’écouter, de regarder le monde autour de soi ; il suffit de lire
les faits divers dans la presse, de consulter les mains courantes dans les
commissariats, de fouiller dans les
poubelles des hôpitaux… Même la tête sous la couette, on ne peut se « débarrasser de la réalité »
(p. 80). La réalité fournit le matériau, l’imagination vient ensuite donner
forme et force à la fiction.
Mais tout cela, à quelle
fin ? Car loin de toute tentation moralisante, s’agit-il seulement de
réfléchir ou de faire réfléchir… ? En raison de l’actualité, ces nouvelles
du monde seraient-elles encore plus noires que les précédentes ?
Peut-être… quand, outre les maladies, les viols, les tortures, les meurtres,
les suicides, les infanticides, les féminicides qui se succèdent au quotidien,
il y a aussi les terrorismes, les guerres, les violences de la nature, les
violences sociales et les épidémies qui nous dépouillent encore un peu
plus de notre humanité, avec des morts enterrés à la va-vite, des cendres
dispersées au vent…
S’il est difficile de rendre
compte de la diversité de cette foule composée de femmes et d’hommes anonymes,
ces 500 petites nouvelles sur la vie quotidienne de nos contemporains sont à
lire comme 500 concentrés de noire violence
et comme autant de romans en puissance de notre triste tragédie humaine.
A lire... peut-être à petites doses pour que ces "microfictions" nous immunisent contre les violences de la réalité.
Spiaggia, Emmanuel Roche, Paul&Mike, 216 pages, 15 €
A lire pour avoir un avant goût de l'été...
Joël
Glaziou
(Lire
entretien et nouvelles d’E. Roche sans
Harfang N° 49 & 53)
Les petits
personnages,
Marie Sizun, Arléa, 260 p., 20 €
Marie Sizun a raison : on ne prête pas assez attention aux « petits personnages », ces personnages secondaires de cinéma, de théâtre, de roman… et aussi à ces silhouettes minuscules qui l’ont fascinée sur certains tableaux devant lesquels on passe souvent sans s’attarder. Elle en a sélectionné trente et un (principalement entre 1830 et 1920 : Caillebotte, Ensor, Monet, Vallotton…), les a observés de près, s’est penchée sur les détails et leur a redonné dans ce recueil leurs « lettres de noblesse ». Car qu’il s’agisse de Johanna, la « dame en bleu » des Très riches heures du Duc de Berry ou qu’il s’agisse de deux promeneurs qui dialoguent sur la « grève blanche » de F. Valloton, ils ne sont pas là par hasard : le peintre en les plaçant là a voulu équilibrer sa composition, a voulu donner vie à un paysage trop figé… mais la silhouette à peine esquissée dans un éternel présent lui échappe et l’imagination de chacun l’anime aussitôt, lui attribue un passé, un avenir, lui invente une histoire, un destin. Ainsi le peintre révèle une narration qui n’est qu’un « pré-texte » que l’écrivain n’a plus qu’à développer. Ce sera une nouvelle qui saisit un instant crucial dans la vie d’un homme ou d’une femme, l’instant où le regard de « la femme du meunier » rencontre le regard de son apprenti (dans un tableau de N. Garstin, 1901). Cela pourrait être un embryon de roman racontant « l’histoire d’une petite fille mal aimée, née on ne sait comment ni pourquoi d’un couple mal assorti » (dans « La promenade sur le port du Pouliguen » d’E. Vuillard, p. 119).
S’attarder sur ces personnages qui ne sont pas au centre des tableaux est aussi pour M. Sizun l’occasion de poursuivre ses sujets de prédilection pour les femmes solitaires, mal mariées, aux vies empêchées dont elle a souvent fait le portrait en demi-teinte dans ses romans (où chaque couverture renvoie déjà à un tableau) : lingère ici, couturière là. Ainsi cette domestique dans la « fenêtre sur cour » saisie par Hammershøi (déjà présent sur la couverture d’Un léger déplacement). À travers ce « recueil-exposition » et ces trente et une « fantaisies » qui font la part belle à l’imagination, le lecteur plonge dans des vies pleines de drames et de violences, de tendresses et d’amours.
A lire pour retrouver les "petits personnages" qui passent au second plan dans les paysages, dans les tableaux et dans la vie quotidienne
Joël GLAZIOU
(Lire
entretien et nouvelle de Marie Sizun
sans Harfang N° 53)