samedi 19 mars 2016

COUPS DE COEUR DE PRINTEMPS


Vent de boulet, Sylvie Dubin, Ed. Paul&Mike, 264 pages, 15 €

 
On peut ne pas aimer les recueils de nouvelles et on peut ne pas aimer les récits historiques, mais devant ce troisième recueil de S. Dubin, aucune généralité, aucun préjugé ne peut résister à la lecture !
De la première page de « Bleu horizon » qui raconte les signes avant-coureurs de la Guerre 14-18 à Merlet-Font avant la déclaration du 1er août jusqu’à la dernière page de « Blanc, bleu... » où l’on érige en 1920 un monument aux morts dans cette même commune de Normandie, le lecteur est plongé dans les petites histoires de la Grande Guerre.
 
Bien sûr, d’aucuns objecteront que certains noms de lieux comme Merlet-Font et certains personnages comme Blaise Gaillard, Camille Faye, Elise Simon et d’autres qui réapparaissent dans plusieurs nouvelles sont sortis de l’imagination de l’auteur. Mais pour le reste, tout, dans les moindres détails, est authentique, du récit de la catastrophe ferroviaire de la vallée de la Maurienne (dans « À tombeau ouvert ») jusqu’au plus petit bouton de la capote des poilus. Car pour l’auteur « il suffit d’assembler les découpes de l’Histoire, et ce n’est qu’aux coutures que l’imagination travaillera » (p. 42).
Comme pour ses précédents recueils, S. Dubin a composé, organisé un ensemble unifié en procédant par parallélismes, reprises et effets de miroir. Mais l’originalité réside surtout dans le choix des sujets et dans le point vue qui surprend à chaque fois le lecteur qui peut alors s’interroger sur ces petites histoires qui font la grande Histoire.
Ainsi on assiste à travers une enquête quasi policière à la naissance du service cinématographique des armées (dans « Cinéma-cantonnement »). On s’enfonce dans la boue des tranchées avec les tirailleurs sénégalais (dans « Nénette et Rintintin »). On plonge sous la mer avec les premiers mariniers (dans « Histoire d’U. »). On survole les champs de bataille avec les premiers aviateurs, avec les premiers aérostiers dans leur ballon captif (dans « Sur la terre comme au ciel ») ou avec les pigeons utilisés pour faire passer des messages en Argonne (dans « Cher ami », publié dans Harfang N° 46).
On apprend aussi comment un véritable toréador peut se faire embrocher par une baïonnette au Bois Camard en 1916 du côté de Verdun (dans « S’ils nous pardonnent »), comment une cousette en grève peut rencontrer un médecin auxiliaire en permission à Paris avec son parapluie sous le bras (dans « La faute à Ducasse »), comment un peintre peut trouver son inspiration dans la catastrophe d’un train fou qui fit 425 victimes parmi les poilus en permission ( dans « À tombeau ouvert »), comment la même Elise Simon peut « sculpter » les gueules cassées pour leur redonner apparence humaine (dans « The Tin Nose Shop ») et sculpter les statues des monuments aux morts érigés dès les années 20 (dans « Blanc, bleu… »)…
On attend de découvrir avec la marraine de guerre le « poilu » avec lequel elle a correspondu pendant des mois (dans « Chaleureuse marraine ») et on est surpris de découvrir « La Clef » de l’énigme que constitue l’histoire de deux frères dont l’un est mort à Verdun et l’autre végète depuis lors dans un hospice d’aliénés.   
Voici donc treize nouvelles qui s’entrecroisent, s’interpénètrent pour dresser devant les lecteurs le théâtre quotidien de la guerre, cette « comédie inhumaine » comme l’écrit l’historien A. Jacobzone dans la préface. Treize nouvelles qui s’enchaînent comme les chapitres d’un roman où, un siècle après la fin des combats, l’on entend encore siffler le « vent de boulet ». Treize nouvelles où des hommes et des femmes s’interrogent sur le sens de cette « boucherie héroïque ». Le chiffre 13 revenant d’ailleurs comme un leitmotiv, un fil rouge, où sans faire de numérologie comme dans « Nénette et Rintintin » les personnages s’interrogent pour savoir s’il faut lire les chiffres comme des signes du destin.
Au final, ce recueil est beaucoup plus qu’un recueil de nouvelles, plus qu’un « roman-par-nouvelles », plus qu’un récit historique qui serait réservé à quelques amateurs de nouvelles ou de récits historiques. C’est un livre qui s’adresse à tous et que chacun doit lire, toutes affaires cessantes. 
Joël Glaziou

 
Deux ans de vacances et plus, Luc-Michel Fouassier,
Éditions Quadrature, 102 pages, 15 €
 
Comme dans ses deux recueils précédents, L.-M. Fouassier propose un ensemble unifié de 7 nouvelles où l’on rencontre sept personnages décidés, obstinés qui ont choisi « d’aller jusqu’au bout » comme le rappelle la citation de Georges Simenon placée en exergue. Ni opiniâtres, ni entêtés, ils se caractérisent par une constance, une persévérance dans leurs idées, dans leurs actions, dans leurs attitudes.
 
Ainsi dans la première nouvelle intitulée L’accompagnateur, un fils (avec beaucoup de dérision, d’autodérision même s’il s’agit de l’auteur lui-même) va suivre à vélo son père d’une soixantaine d’années qui a décidé de faire la célèbre course à pied  « les 100 bornes de Millau » ! Au fil des kilomètres, on s’aperçoit que le plus dur n’est sans doute pas pour le père mais bien pour le fils… et que dans cette course -métaphore de la vie- où l’important est de participer, selon la formule connue, les deux iront jusqu’au bout, sans que l’on sache vraiment qui est l’accompagnateur de l’autre !
Dans Une hésitation (parue dans Harfang N° 47), un écrivain arrivant à bout de son roman (412 pages et 2 ans de travail) s’interroge : son héros Vittorio pressera-t-il sur la détente du révolver ou… ?
Dans Deux ans de vacances et plus, il est fait référence à un roman (peu connu certes) de Jules Verne et surtout à son adaptation dans une série télévisée des années 70. Si cette nouvelle donne son titre au recueil, c’est aussi parce que dans nombre de nouvelles (et romans) de L.-M. Fouassier, les personnages sont souvent de grands lecteurs et /ou de grands cinéphiles. Tout le plaisir de la lecture réside alors dans le repérage de ses clins d’œil de connivence culturelle.
Enfin quand il s’agit de regarder le passé (dans Retroviseur), de (re)faire le voyage de noces de ses parents dans le sud ou d’accompagner son ami Pascal au cimetière dans Condoléances, escalators et nems… pas de chute spectaculaire,  car ces nouvelles reposent sur une forme de suspense et jouent sur l’attente du lecteur qui s’interroge : ira-t-il jusqu’au bout ?
Deux ans de vacances et plus, c’est 7 nouvelles de plaisir et plus !

Joël Glaziou

En complément, on peut lire l'entretien
avec Luc-Michel Fouassier
dans le N° 47 d'Harfang
et sous l'onglet "Rencontres"

 
 
 
 

 

mardi 1 mars 2016

PRIX HERVE-BAZIN DE LA MICRO-FICTION 2016

La troisième édition du Prix de la Micro-fiction Hervé-Bazin est lancée.
Le thème en est désormais connu : "La nature, moi, vous, nous ! Toute une histoire... ! " et renvoie expressément au roman d'Hervé-Bazin "L'Eglise verte"
La date de clôture est fixée au 10 juin 2016 et la date de remise du Prix le samedi 26 novembre...


Le règlement complet est à consulter sous  notre onglet "Prix & Concours"